Publications par Alborz Tolou

La légalité de la prorogation du Parlement britannique par Boris Johnson

Supreme Court of the United Kingdom, Miller v The Prime Minister, [2019] UKSC 41

La décision du Premier ministre britannique de proroger, et donc de fermer, le Parlement britannique est une décision justiciable qui peut dès lors faire l’objet d’un contrôle de légalité par un tribunal. La prorogation est illégale si elle a pour effet de frustrer ou d’empêcher, sans motifs justificatifs, la possibilité pour le Parlement d’exercer ses fonctions constitutionnelles en tant que législateur et en tant qu’organe responsable de surveiller le pouvoir exécutif.

Faits

Le 31 octobre 2019, le Royaume-Uni est censé perdre son statut d’État membre de l’Union européenne (Brexit), à moins que le Conseil européen n’octroie, sur décision unanime et sur demande du Gouvernement britannique, une nouvelle extension du statut d’État membre ou que le Gouvernement britannique décide de révoquer la demande de retrait de l’Union européenne, comme il a le droit de le faire de manière unilatérale (cf. LawInside.ch/689).

C’est dans ce contexte que, le 27 août 2019, le Premier ministre britannique, Boris Johnson, a recommandé à la Reine d’ordonner la prorogation, et donc la fermeture, du Parlement britannique pour une date à fixer entre le 9 et 12 septembre 2019 et ce jusqu’au 14 octobre 2019.… Lire la suite

L’ordonnance de séquestre à l’encontre d’un débiteur solidaire

ATF 145 III 221 | TF, 08.03.2019, 5A_279/2018*

Pour qu’une ordonnance de séquestre à l’encontre d’un débiteur solidaire soit valide, il n’est pas nécessaire que l’ordonnance contienne une mention de l’existence du rapport de solidarité.

Faits

Une société obtient du Tribunal de première instance de Genève deux séquestres à l’encontre de deux sociétés pour une créance d’environ 19 millions de francs pour laquelle les deux sociétés sont débitrices solidaires. Sous la rubrique « titre et date de la créance-cause de l’obligation » sont mentionnés deux jugements différents qui fondent la créance, l’un de la High Court of Justice de Londres et l’autre de la United District Court for Eastern District of Virginia Norfolk. L’ordonnance de séquestre mentionne la créance et les biens séquestrés, mais ne mentionne pas le fait que les deux sociétés sont débitrices solidaires de la créance. L’une des sociétés débitrices conteste l’ordonnance de séquestre jusqu’au Tribunal fédéral et soutient que celle-ci doit mentionner l’existence du rapport de solidarité.

Le Tribunal fédéral doit ainsi se prononcer sur la question de savoir si une ordonnance de séquestre à l’encontre d’une personne qui est débitrice solidaire d’une obligation doit impérativement faire mention de l’existence du rapport de solidarité pour être valide.… Lire la suite

Le délai raté en raison du dysfonctionnement de l’automate « My Post 24 »

TF, 05.02.2019, 5A_972/2018

Un recourant qui, par le biais de son avocat, dépose une plainte le dernier jour du délai via un automate « My Post 24 », mais qui, au moment du dépôt du colis contenant la plainte, voit l’automate subir un dysfonctionnement et, par conséquent, ne pas délivrer une quittance permettant de prouver le dépôt du colis à temps, doit agir dès que possible (en l’espèce, le lendemain) auprès de l’autorité compétente pour apporter la preuve du dépôt de la plainte à temps, notamment à l’aide d’un témoin, ou demander une restitution de délai.

Faits

Une Etude d’avocats est chargée de déposer une plainte au nom de son client à l’encontre d’un procès-verbal de séquestre, reçu le 14 juin 2018, que son client avait requis. L’avocate-stagiaire de l’Etude en cause se rend à un automate « My Post 24 » à Genève le 25 juin 2018 à 23h30, soit au dernier des 10 jours de délai pour déposer une plainte, et dépose le colis contenant la plainte dans la case sélectionnée et referme la porte de celle-ci. L’automate ne confirme pas la prise en charge du colis et se réinitialise sans délivrer de quittance. Un témoin est présent et est en mesure de confirmer ce fait.… Lire la suite

Le lieu habituel de l’activité du travailleur comme for judiciaire

ATF 145 III 14 | TF, 14.01.2019, 4A_527/2018*

Le travailleur peut agir à l’encontre de son employeur au lieu où il exerce habituellement son activité professionnelle. Pour déterminer ce lieu, le juge ne doit pas uniquement tenir compte d’un critère absolu et choisir le lieu où le travailleur occupe la majeure partie de son temps de travail global. Il doit aussi tenir compte de l’importance qualitative du lieu envisagé. Ainsi, un travailleur qui accomplit des tâches administratives depuis son domicile pour le compte de son employeur peut agir à son domicile à l’encontre de ce dernier, et ce, alors même que son activité à domicile ne correspond qu’entre dix et vingt pour cent de son temps de travail.

Faits

Un employé domicilié à Conthey dans le canton du Valais travaille en tant qu’account manager responsable pour le canton du Valais pour une société dont le siège se trouve à Opfikon dans le canton de Zurich. L’employé ouvre action contre la société devant le juge de district à Conthey et réclame le paiement d’une indemnité pour licenciement abusif.

Le juge de district constate son incompétence à raison du lieu et déclare la demande irrecevable. Sur appel, le Tribunal cantonal du Valais considère le juge de district est compétent en raison du lieu pour traiter de cette demande et lui renvoie l’affaire.… Lire la suite

La responsabilité de l’exécuteur testamentaire à l’égard du légataire

ATF 144 III 217 | TF, 22.02.2018, 5A_363/2017*

Le seul devoir de l’exécuteur testamentaire envers le légataire est de délivrer le legs. Ainsi, un légataire ne dispose pas d’une prétention en responsabilité à l’encontre d’un exécuteur testamentaire qui se serait versé des honoraires excessifs, dès lors que l’éventuel dommage subi par le légataire ne découle pas d’une violation du devoir de délivrer le legs, mais de la violation de l’obligation de diligence et de fidélité de l’exécuteur testamentaire, obligation dont le légataire n’est pas directement bénéficiaire. Le fait que le legs consiste en une quote-part de la masse successorale n’y change rien.

Faits

Un légataire d’une succession est au bénéfice d’un legs consistant en une quote-part d’un vingtième du total du montant net de la masse successorale. Un avocat-notaire agit comme exécuteur testamentaire de la succession. Selon son décompte, la fortune successorale est d’environ 54 millions de francs. Il délivre ainsi environ 2.7 millions de francs au légataire en exécution du legs. Il se verse aussi 600’000 francs d’honoraires pour son travail en tant qu’exécuteur testamentaire.

Le légataire ouvre une action en justice à l’encontre de l’exécuteur testamentaire pour contester le montant de ses honoraires qu’il estime excessif. L’action du légataire est rejetée en première et en deuxième instance.… Lire la suite