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Le droit d’être entendu et le procès-verbal d’une inspection des lieux

ATF 142 I 86 | TF, 03.05.2016, 1C_457/2015*

Faits

Dans un litige concernant un droit de passage régi par le droit public, une partie recourt à l’Obergericht appenzellois contre la décision du département compétent. Le tribunal procède à une inspection des lieux ; de nombreuses photos destinées au dossier sont prises à cette occasion. Par arrêt du même jour, l’Obergericht annule la décision prise par l’autorité administrative précédente. La partie succombante interjette recours en matière de droit public au Tribunal fédéral en faisant valoir que le tribunal cantonal aurait dû lui permettre de prendre connaissance du procès-verbal de l’inspection des lieux et de se déterminer à ce sujet. La question qui se pose est dès lors celle du respect du droit d’être entendu concernant le procès-verbal d’une inspection des lieux.

Droit

Le recourant a pu prendre connaissance des constatations retenues lors de l’inspection des lieux par l’Obergericht seulement à la lecture du jugement. S’agissant du procès-verbal, il lui a été soumis pour la première fois à l’occasion de l’échange d’écritures devant le Tribunal fédéral.

L’Obergericht justifie sa décision en se référant à sa pratique constante, parfaitement connue par l’avocat du recourant ; d’après celle-ci, le tribunal in corpore (composition complète) effectue les inspections et rend le jugement le même jour.… Lire la suite

L’interdiction d’exercer (art. 33 LFINMA)

ATF 142 II 243

Faits

Dans le cadre de ses activités avec des clients américains, une banque viole gravement ses obligations en matière de surveillance financière. La FINMA constate ces violations dans une décision rendue en 2013 en reprochant à la banque d’avoir violé son devoir de satisfaire en permanence aux conditions nécessaires au maintien de l’autorisation bancaire. Cette décision n’a fait l’objet d’aucun recours. La banque cesse ses activités quelque temps après. Par la suite, la FINMA prononce une interdiction d’exercer à l’encontre du CEO de la banque en question. La durée de l’interdiction est fixée à deux ans et s’étend à toute activité auprès d’un institut surveillé par la FINMA. Pour l’essentiel, la FINMA reproche au CEO d’avoir omis de prendre les mesures adéquates en matière de contrôle des risques concernant l’activité américaine de la banque.

Le CEO est débouté devant le Tribunal administratif fédéral. Il saisit alors le Tribunal fédéral d’un recours en matière de droit public, en faisant valoir qu’il n’a pas gravement violé ses obligations en matière de surveillance.

D’une part, le Tribunal fédéral est amené à concrétiser la relation qui existe entre le prononcé d’une interdiction d’exercer et la procédure disciplinaire menée à l’encontre de l’institution surveillée dans laquelle la personne sanctionnée travaille ; d’autre part, il doit se pencher sur la nature juridique de l’interdiction d’exercer.… Lire la suite

Le droit à la réplique en arbitrage international (art. 182 al. 3 LDIP)

ATF 142 III 360 | TF, 26.04.2016, 4A_342/2015*

Faits

Un groupe de sociétés de droit turc (demandeur) vend une de ses filiales à une société allemande (défendeur). Ce contrat de vente, intitulé Share Sale and Purchase Agremment (SPA), prévoit que la société allemande a l’obligation de conclure un Distributorship Agreement (DA) de durée illimitée entre sa filiale fraîchement achetée et une filiale du groupe de sociétés turques.

Trois ans après la conclusion du DA, la filiale du défendeur résilie le contrat. Le groupe de sociétés turques considère que la résiliation de ce contrat a pour conséquence l’extinction du SPA et dépose donc une requête d’arbitrage en vue de faire constater cette extinction.

Un tribunal arbitral CCI, avec trois arbitres et siège à Zurich, est constitué. Les parties se mettent d’accord sur la procédure  : le groupe de sociétés turques déposera en premier son Statement of Claim, puis le défendeur devra rendre son Statement of Defence, et, enfin, le Tribunal arbitral tranchera la question de l’effet de la résiliation du DA sur l’existence du SPA.

Après avoir reçu le Statement of Defence, le groupe de sociétés turques indique au Tribunal qu’il aimerait encore produire des témoignages ainsi qu’un avis de droit.… Lire la suite

L’avis aux débiteurs en cas d’enfant majeur (art. 291 CC)

ATF 142 III 195 | TF, 04.03.2016, 5A_925/2015*

Faits

Le Président du Tribunal civil de la Sarine rend une décision d’avis aux débiteurs (art. 291 CC) dans laquelle il impose à l’employeur de verser directement une pension à la fille du travailleur par prélèvement sur son salaire. La décision d’avis aux débiteurs se fonde notamment sur une attestation d’inscription à l’université de la fille. Cette attestation a été communiquée au père en même temps que la décision.

Se plaignant de la violation du droit d’être entendu du fait que l’attestation lui a été communiquée en même temps que la décision (art. 29 Cst.), le père fait appel au Tribunal cantonal. Celui-ci admet une violation du droit d’être entendu, mais décide de ne pas annuler la décision, le recourant n’ayant pas démontré l’incidence du vice sur la décision d’avis aux débiteurs.

Le père forme un recours en matière civile devant le Tribunal fédéral qui doit se déterminer sur la violation du droit d’être entendu et sur l’application de l’art. 291 CC à l’enfant majeur.

Droit

Le droit d’être entendu garantit notamment le droit pour une partie à un procès de prendre connaissance de toute pièce du dossier et de se déterminer à leur propos (art.Lire la suite

Le principe de la double instance cantonale en matière d’exequatur (art. 106 EIMP)

ATF 142 IV 170 – TF, 01.03.2016, 6B_346/2015*

Faits

Le Ministère de la Justice autrichien demande l’exécution d’une décision de condamnation d’un individu à une peine privative de liberté à l’autorité compétente suisse. Après consultation de l’autorité d’exécution du canton de Berne, l’Office fédéral de la Justice (ci-après : l’OFJ) admet la demande. L’autorité d’exécution demande alors à l’Obergericht bernois de mener la procédure d’exequatur. Après avoir entendu le procureur général, celui-ci déclare le jugement autrichien exécutoire. L’intéressé recourt alors au Tribunal fédéral contre cette décision au motif que son droit d’être entendu aurait été violé et qu’aucune voie de droit cantonale ne se trouvait à sa disposition.

Droit

Selon l’art. 104 al. 1 EIMP, l’OFJ rend une décision sur l’acceptation formelle de la demande d’exécution. S’il l’admet, il transmet le dossier avec son avis à l’autorité d’exécution. Ensuite, le juge cantonal matériellement compétent selon l’art. 32 CPP renseigne le condamné sur la procédure, l’entend en présence de son mandataire et statue sur l’exécution (art. 105 EIMP). Si les conditions de l’exécution sont remplies, il déclare la décision exécutoire et prend les mesures nécessaires (art. 106 al. 2 EIMP). La décision doit être rendue sous la forme d’un jugement motivé et le droit cantonal doit prévoir une voie de droit (art.Lire la suite