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Respect des clauses de réclamation et interruption de causalité: Le Tribunal fédéral se montre intransigeant

TF, 08.01.2025, 4A_610/2023

En cas d’ordre frauduleux et en dehors des cas de banque restante, le défaut de réclamation du client dans le délai convenu contractuellement représente une faute concomitante qui interrompt la causalité entre le dommage subi et la faute grave de la banque.  

Faits

Une fondation est titulaire d’un compte auprès d’une banque genevoise. Il ressort de la documentation contractuelle une clause de transfert de risque ainsi qu’une clause de réclamation indiquant qu’en cas d’avis portant sur un ordre frauduleux la fondation est tenue de les contester dans un délai de 30 jours.

En avril 2017, un fraudeur prend le contrôle de la boîte email du comptable du bénéficiaire de la fondation et parvient à convaincre un membre du conseil de fondation d’ordonner à la banque un transfert de USD 650’000 sur un compte à Hong Kong et un autre de USD 103’000 à Henan en Chine. La banque notifie les avis de débit de ces deux transferts les 13 avril et 2 mai 2017. La fondation ne conteste pas la validité de ces opérations dans le délai de 30 jours précité.

La fondation ouvre action en paiement contre la banque pour un montant de USD 753’000.… Lire la suite

La preuve des pertes du client incombe à la banque

TF, 16.07.2024, 4A_301/2023

Lorsque la banque liquide les positions du client et qu’il en résulte un solde négatif, il appartient à la banque de prouver les pertes. À défaut, la banque ne prouve pas l’existence de sa créance à l’encontre du client.

Faits

En 2011, un client utilise la plateforme informatique d’une banque vaudoise afin de spéculer sur la variation du cours USD/CHF. Le 15 janvier, la BNS annonce qu’elle abandonne le taux plancher CHF/EUR. Cela provoque un vent de panique et rend le marché USD/CHF temporairement illiquide. Conformément aux conditions générales, la banque liquide les positions du client et l’informe, quelques jours plus tard, que son compte est d’une valeur négative de USD 929’075.

La banque ouvre action en paiement contre le client auprès de la Chambre patrimoniale du canton de Vaud. Dans ses allégués n°83 à 86, la banque indique que la liquidation automatique des positions du client s’est soldée par une perte de USD 1’125’991.40 et, qu’après déduction des avoirs en compte du client de USD 193’325.62, le débit du compte était de USD 929’075.

Dans sa réponse, le client conteste ces quatre allégués et dépose une demande reconventionnelle afin que le montant de USD 193’325.62, soit le solde de son compte avant la liquidation, lui soit restitué.… Lire la suite

Le secret d’avocat dans le cadre d’une enquête interne au sein d’une banque 

TF, 02.03.2023, 1B_509/2022

Sont couverts par le secret professionnel dans leur intégralité les documents établis par une étude d’avocats dans le cadre d’une enquête interne au sein d’une banque et qui contiennent tant des constatations factuelles que des conseils légaux. 

Faits

En juin 2017, le Ministère public de Genève ouvre une procédure pénale contre une banque fondée sur les art. 305bis et 102 al. 2 CP en lien avec les détournements reprochés à son conseiller clientèle.

Le Ministère public requiert de la banque la production de divers documents. Celle-ci fournit deux clés USB.

La première clé est librement accessible et contient des rapports relatifs à la gestion des avoirs par le conseiller, des audits internes sur le département dans lequel travaillait le conseiller, ainsi que des directives internes de la banque en matière de lutte anti-blanchiment.

La deuxième clé contient des documents similaires, antérieurs à la période pénale pertinente et couverts par le secret professionnel, raison pour laquelle la banque demande sa mise sous scellés.

Le Ministère public demande la levée des scellés sur la deuxième clé au Tribunal des mesures de contrainte du canton de Genève, lequel admet partiellement la demande.

La banque recourt contre cette ordonnance auprès du Tribunal fédéral, lequel est amené à préciser sa jurisprudence sur l’étendue du secret d’avocat dans le cadre d’une enquête interne au sein d’une banque.Lire la suite

Quelle action contre la banque lors de transactions non autorisées ?

ATF 149 III 105 | TF, 13.09.2022, 4A_407/2021*

Le client qui conteste avoir autorisé des transactions doit déposer une action en dommages-intérêts, et non en exécution, sauf si la transaction non autorisée provient d’un défaut de légitimation.

Faits

Un chargé de relation, responsable du desk turc d’une banque, procède à des transactions (opérations Forex, investissements, virements…) sur les comptes de plusieurs clients, sans avoir reçu d’ordres au préalable. Afin de dissimuler ces transactions non autorisées, l’employé remet aux clients uniquement des résumés qu’il a lui-même préparés, et non des documents officiels de la banque.

Lorsque le chargé disparaît en Turquie, la fraude est découverte. Plusieurs clients actionnent la banque afin d’obtenir le remboursement des montants débités sans droit (cf. TF, 17.02.2020, 4A_126/2019 commenté in cdbf.ch/1112 et ACJC/548/2021). Dans le cas qui nous intéresse, le client a listé douze transactions qu’il n’avait pas ordonnées, totalisant EUR 4’550’958,30.

Le client saisit le Tribunal de première instance genevois d’une demande en paiement. Il agit à titre principal en exécution du contrat, réclamant la restitution de ses avoirs, et, à titre subsidiaire, en responsabilité pour inexécution du contrat, exigeant la réparation de son préjudice.

Après une procédure de près de dix ans, le Tribunal condamne la banque, en application des règles de la gestion d’affaires sans mandat (art.Lire la suite

Appel de marge et réalisation des actifs par la banque

TF, 24.01.2021, 6B_1381/2021

Une banque ne commet pas de gestion déloyale en reprenant pour son compte et à un prix inférieur au marché les positions d’un client n’ayant pas satisfait aux besoins en marge fixés préalablement dans un contrat execution only de négoce d’options et de futures. 

Faits

En 2015, un client conclut avec sa banque un contrat execution only de négoce d’options et de futures. Le contrat oblige le client à surveiller en permanence son compte afin de respecter les besoins en marge de la banque. Ceux-ci sont fixés par la banque en fonction du risque généré par la transaction ou de la stratégie envisagée par le client. Si les besoins en marge ne sont pas satisfaits, la banque peut réaliser les positions à sa libre appréciation, même à un prix défavorable.

En 2018, la banque informe le client d’une augmentation de ses besoins en marge et de la nécessité de fournir immédiatement des fonds supplémentaires (appel de marge). Le client n’ayant pas répondu, la banque réalise les positions du client en les reprenant dans ses livres et lui transmet une confirmation de transactions. Ce document indique que les positions ont été réalisées sur le marché boursier, mais ne mentionne pas qu’elles ont été reprises par la banque.… Lire la suite